Emballage : les faces cachées du fond de la boîte
Préambule : Ce billet est un article prévu pour être enrichi au fil du temps. Les exemples cités sont tirés de ma ludothèque personnelle mais je serais très heureux de compléter cette galerie avec d’autres jeux, existant et à venir. N’hésitez donc pas à me faire parvenir vos photos pour développer ce billet !
Aujourd’hui, pas d’analyse alambiquée ou de tirade moralisatrice . Un peu de sérieux, on s’attaque à un sujet de fond. De fond de boîte plus exactement.
La boîte de jeux est au centre de toutes les attentions. Celle des éditrices, d’abord : pour en faire un contenant adapté au matériel de jeu. Mais aussi surtout pour y vanter les louanges du jeu, à grand renfort d’illustrations chamarrées et de textes prometteurs. Les attentions des joueuses ensuite pour qui la boîte est le premier contact avec le jeu.
Pourtant, dans chacune de ces boîtes se cachent quatre faces délaissées, peu utilisées par les unes et peu vues par les autres : les parois du fond de la boîte.
Merci patron
On parle ici d’un boîte standard dite « boîte cloche », constitué de deux parties indépendantes :
- le couvercle (face et quatre parois)
- un fond (dos et quatre parois également)
Avant d’être ouverte, on ne voit de la boîte que son couvercle, ses quatre parois externes et son dos. Restent en revanche invisibles le fond du couvercle, l’intérieur du fond (vous suivez ?) et, ce qui nous intéresse ici, les quatre parois du fond de la boîte.
En revanche, dès qu’on ouvre la boîte, ces quatre faces deviennent visibles (voir figure A, en bleu). Pour des joueuses aguerries, ces parois resteront mêmes sous les yeux toute la partie, sur le bord de la table. Car les joueuses aguerries évitent, par expérience, de placer le fond emboîté dans le couvercle : c’est trop compliqué à dés-emboîter, on ne les y reprendra plus.
Ces quatre bords du fond de la boîte, inutiles pour faire la promotion de jeu, sont donc des espaces tout trouvés pour informer pendant la partie de jeu. Et pourtant… Trop peu d’éditrices osent ou pensent à s’en emparer. Voici pourtant quelques exemples d’usages possibles dont s’inspirer.
Je mets volontairement de côté les jeux qui utilisent la boîte comme matériel de jeu : on parle ici d’information diffusée sur les bords du fond de boîte.
Pour faire de la publicité
Les responsables marketing détestent la place perdue. Maintenant que la joueuse a acheté une boîte, tentons de lui vendre toute la gamme !
Ainsi une boîte du jeu Exit vous proposent deux autres opus, à jouer juste après :
Même chose pour le jeu Galerapagos qui donne à voir d’autres jeux du même éditeur :
Pour donner envie de jouer
Il est un peu tard pourtant mais la boîte de Profiler donne quelques exemples des questions inédites que pose le jeu, une mise en bouche qui expose aussi le principe du jeu en quelques mots :
De la même manière, la boîte de PIX affiche quelques énigmes pixelisées en guise d’amuse-gueule :
Pour présenter les créatrices
Cet espace peut servir à présenter les autrices et plus généralement, celles et ceux qui ont travaillé sur le jeu. Ce n’est pas une information utile pendant la partie mais c’est une façon comme une autre de reconnaître le travail et le talent des artistes à l’œuvre. C’est même sans doute mieux valorisé ici qu’au fond du livret de règle. Quelques exemples :
Matthias Cramer, l’auteur, exposé au grand jour sur une des faces de la boîte de Watergate :
Les quatre parois du fond de la boîte Sobek 2 joueurs exposent l’éditeur Catch Up Games, chacun des deux auteurs (Bruno Cathala et Sébastien Pauchon) et l’illustrateur Naïade. Une belle équité.
La boîte de Paleo (un jeu de Peter Rustemeyer) n’utilise que deux faces sur quatre pour présenter l’illustrateur, Dominik Mayer, et le graphiste, Franz. L’auteur, lui, a son nom sur le couvercle et sa biographie dans le livret de règle. Chacun son domaine !
Le fond de la boîte de Wingspan (un jeu de Elizabeth Hargrave) dresse la liste des nombreux testeurs et relecteurs du jeu ! Par manque de place dans le livret de règle ou par choix ?
Pour faciliter le rangement
La boîte de Wingspan, encore elle, comporte sur une autre face une proposition de rangement du matériel de jeu. Un schéma à suivre à la lettre pour réussir à refermer la boîte avec tout son matériel à l’intérieur :
Pour compter les points
Dans Loony Quest (un jeu de Laurent Escoffier et David Franck), le pourtour du fond de la boîte sert de piste de score (rappelée également à l’intérieur des parois pour être visible de toutes). Cela nécessite un marqueur par joueur et un thermoformage adapté :
D’autres jeux comme par exemple Skyliner utilisent également ce principe.
Pour rappeler les règles
Les deux catégories précédentes n’interviennent pas au cours de la partie elle-même. Alors que, comme dit plus haut, c’est là un lieu d’information disponible sous les yeux des joueuses ! Pour ma part, je chéris les boîtes qui en fournissant la bonne information évite d’aller fouiller dans le livret de règle en milieu de partie.
La boîte de The Mind (chez l’éditeur Oya connu pour ses règles au cordeau) fait en cinq lignes le rappel des points de règles les plus facilement oubliables et la mise en place de chaque niveau. Prouesse !
Autre exemple, toujours chez Oya avec le jeu Manga Kay qui présente sur son fond de de boîte ce même rappel des règles et un lexique (!), qui mériteraient cependant un meilleur contraste :
Pour La Course des Tortues, c’est encore un rappel des règles mais aussi la répartition des cartes du jeu :
Je ne vais pas tous les lister mais d’autres jeux de cet éditeur reprennent le même principe : The Game, Illusion, Can’t stop.
Pour calculer le score
Pour Agricola 2 joueurs, plutôt que de fournir une aide de jeux, c’est le fond de la boîte qui indique les scores de fin de partie selon la taille de votre cheptel :
Même aide au calcul de score pour Ohanami (encore chez l’éditeur Oya) sur deux faces de la boîte (et même une règle de variante sur une troisième face !) :
Pour accomplir des succès
Dans le jeu Cerbère, les bords du fond de la boîte accueillent des auto-collants quand on remplit certains conditions de victoire. Une boîte « tableau de chasse » !
Pour aider la mise en place !
Trêve de babillage, venons-en au but réel de ce billet.
Même si je prétendais le contraire quelques paragraphes plus haut, la boîte n’est pas le meilleur endroit pour donner des explications de jeux un peu sensibles. Difficile en effet d’y donner beaucoup d’informations précises et surtout de les rendre visibles de toutes les joueuses autour de la table pendant la partie. Ça reste possible à deux joueuses mais très compliqué à plus. Rien ne vaut une aide de jeu par joueuse, qu’elle peut consulter comme bon lui semble.
Non. La vraie vocation des parois du fond de la boîte c’est d’aider à la mise en place initiale du jeu ! C’est SON moment. La boîte est au centre de la table, tenue en mains par celles qui sont justement en train d’installer la partie.
Il ne s’agirait pas de tout expliquer sur la boîte mais d’y faire le rappel des points faciles à oublier. Pour éviter de devoir ouvrir le livret de règle pour retrouver où se cachent les questions qu’on se pose à chaque début de partie. Surtout quand on ressort le jeu après quelques semaines… mois… années.
Quelques exemples tirés de mon vécu personnel :
- Pour Patchwork: avec combien de boutons commence-t-on la partie ?
- Dans Res Arcana, combien de monuments et de lieux de puissances selon le nombre de joueuses ?
- Dans Splendor, combien de jetons par couleur et combien de nobles selon le nombre de joueuses ?
- Pour 7 Wonders Duel : le nombre d’ors en début de partie et la disposition des cartes pour chacun des trois âges. Exemple de ce que ça pourrait donner :
Alors ? Vous êtes convaincu ? Militons pour un fond de boîte utile ! Vous l’avez lu ici en premier (même si l’éditeur Oya semble en tirer parti depuis un moment déjà).
Il est aussi possible de réagir à ce billet via Mastodon : @acariatre@ludosphere.fr
Laisser un commentaire