Lectures : Un monde de jeux, Oriol Comas I Coma

Dans cette série de billets, je reviens sur une lecture récente.


Rien à voir ici avec le blog et la chaîne Youtube de Martin Vidberg, le titre complet est ici (retenez votre respiration !) Un monde de jeux – Histoire et mécaniques de jeux de société, du jeu royal d’Ur au Monopoly.

Oriol Comas I Coma est catalan, auteur de nombreux jeux et organisateur du festival DAU Barcelona. Passionné par les jeux, leurs origines et histoires, leur variété et leurs ressemblances, il propose ici un voyage temporel et géographique dans le jeu de société qu’on pourrait qualifier de « prémoderne ». Le jeu comme objet culturel, à la fois fruit et témoignage d’une société et de son époque.

53 jeux sont ainsi présentés dans ce premier ouvrage, depuis les plus anciens jeu recensés (jeu d’Ur, Senet) jusqu’aux années 1970, avec Mastermind et le Uno. La sélection est personnelle et assumée comme telle. Les premières pages sont consacrées à trois jeux indétrônables et connus de toutes : Go, Echecs et Mancala. Mais nombre des jeux présentés ensuite vous seront complétement inconnus, comme Rithmomachie, ses 24 pièces, 6 formes de captures et 8 conditions de victoire ou Surakarta et son plateau en forme de boucle.

Le plateau du jeu indonésien Surakarta et ses boucles (Source : Par Matěj Baťha — Travail personnel, CC BY-SA 2.5, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=1595305)

Sous la couverture

L’auteur cherche visiblement à ne pas tomber dans le piège d’un livre trop formaté, universitaire ou poussiéreux et il y parvient. L’ordre de présentation des jeux semble aléatoire mais cache un secret (non découvert pour ma part). Le ton est proche et facile à lire. Parfois il s’agit surtout d’expliquer les principes du jeu, d’autres fois c’est davantage de son histoire qu’on discute.

La double page consacrée au Jeu de l’oie (source : site de l’éditeur)

La présentation est accessible et pratique. Chaque jeu occupe une ou deux pages pour présenter ses grands principes, son histoire et ses relations avec d’autres jeux. Un cartouche, hérité des boîtes de jeux, rappelle le nombre de joueurs, l’âge minium, la durée de partie mais aussi le matériel nécessaire et la capacité de reproduire le jeu soi-même à la maison. En parler c’est bien, y jouer c’est mieux.

Entre les lignes

Cette lecture est un plaisir. J’ai beaucoup aimé découvrir tout un pan du jeu quasiment inconnu à mes yeux, et entouré de mystère.

D’ailleurs, pour les jeux les plus anciens, seul le matériel et quelques représentations subsistent. Les règles en revanche ont été perdues et on ne peut que tenter de les imaginer. Pour d’autres jeux en revanche, de très nombreuses versions et variantes sont parvenus jusqu’à nous. Difficile alors de dresser les frontières de qui constitue le cœur du jeu.

On est frappé par la filiation très forte entre les jeux présentés. En parcourant les pages on observe le va-et-vient des mécaniques et du matériel, maintes fois repris et réinterprétés d’un bout à l’autre du globe.

Facile pour nous autres joueuses modernes de voir ces jeux comme des ancêtres un peu simplistes mais la réalité est ailleurs. La complexité de certains jeux donnerait mal à la tête à n’importe quel amateur de wargame (Rithmomachie cité ci-dessous ou Camelot). Des mécaniques qu’on pourrait croire modernes existent depuis des siècles : du jeu asymétrique (Les rebelles, Le siège de Paris, Assaut), des jeux où on change de rôle et de façon de jouer en cours de partie (Le jeu de la hyène). Pour ne parler que de ceux-là.

Le nombre de jeux « de réseau » m’a aussi frappé. Dans ces jeux, les pions sont posés sur les nœuds de la grille du plateau plutôt que sur les cases dessinées par cette grille, comme dans le jeu de Go ou le vénérable Alquerque, ancêtre des Dames.

Le jeu Alquerque représenté dans le « Libro de los juegos », livre de référence sur les jeux écrit au XIIIe siècle (Source : Wikipedia, domaine public)

Le livre cite beaucoup de références et l’auteur livre une riche bibliographie et même une « sitographie ».

Des livres sur le jeu

Ce n’est pas un livre à lire d’une traite de la première à la dernière page mais plutôt à picorer de-ci de-là. La plupart des jeux m’étaient inconnus et certains se ressemblent beaucoup mais il y a toujours un fait ou une anecdote qui justifie leur découverte et le voyage en pensée. Parfait pour compléter sa culture et donner envie d’en apprendre encore plus sur les ancêtres de nos jeux préférés.

Je crois me souvenir que le livre avait été au départ annoncé par la regrettée maison d’édition de livres dédiés au jeu de société Illinx Editions. Il est ici édité par Ynnis Editions, spécialisée dans les cultures contemporaines et les genres de l’imaginaire. Le second tome d’Un monde de jeux est déjà annoncé et se consacrera aux jeux de société modernes qui font aujourd’hui référence. Cette double publication annonce-t-elle la promesse d’autres ouvrages consacrés au jeu de société ? Cela ne peut que me réjouir !


Les photographies de la couverture et des page du livre issues du site de Ynnis Editions

À lire et découvrir sur le sujet :


2 réponses à “Lectures : Un monde de jeux, Oriol Comas I Coma”

  1. Le Gaume dit :

    Merci l’acariâtre.
    Cela fait un moment que ce livre est dans ma liste de « produits ludiques » souhaités, sans franchir définitivement le pas.
    Je pense que l’annonce d’un prochain volume sur les jeux modernes est l’argument qui me fera franchir le pas, pour découvrir notamment les liens entre jeux anciens et ceux d’actualité.

    Merci pour la newsletter qui m’a conduit ici.

    Guillaume

    • acariatre dit :

      Merci à toi pour la lecture et le commentaire.

      J’ai hâte de voir comment il aborde le tome suivant aussi.

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